REVEILLER LA DEMOCRATIE

Publié le 30 janvier 2024 à 03:16

Je reprends ici le texte d’un papier que j’avais posté sur un forum (dont je tairai le nom) avec en vignette d’entrée, la photo d’une affiche effrayante placardée sur un arbre que j’avais naïvement photographiée. Aujourd’hui on ne peut plus, hélas, rapporter des faits réels, pour peu qu’ils fassent ressortir les démons du moment, sans déclencher des avalanches de réactions imbéciles de gens qui ne prennent pas le temps de réfléchir et réagissent de façon stéréotypée. On a l’impression que l’esprit humain a été contaminé par les moteurs de recherche qui réagissent à des « mots clés ». Cela me fait penser aussi à ces logiciels dits « de contrôle parental » qui interdisaient par exemple l’accès à la définition des mots comme « cul de sac », classés comme pornographique !  

Certes, on peut critiquer la France et se révolter contre les inégalités mais aujourd’hui la contestation part dans tous les sens, au gré des informations (ou désinformations) qui nous parviennent sur des faits que, bien sûr, nous ne pouvons pas vérifier. Il suffit parfois de la simple déclaration affolante d’un témoin mal informé sur un incident de voie publique pour que les esprits s’embrasent. Et comme par hasard, quand on découvre après coup qu’il s’agissait d’un fait lié par exemple à une dispute conjugale, tous les agitateurs disparaissent dans la nature.

Je vais donc essayer ici de remettre en ligne ce texte où j’exprimais ma crainte de perdre cette liberté qui nous reste encore car d’inquiétants nuages se profilent à l’horizon. Prenons garde à ce que cette pagaille, qui avait fait dire un temps que les Français étaient « ingouvernables », ne nous amène vers une restriction de nos libertés. Comme je l’ai dit dans une vidéo récente sur YouTube, certains connaissent peut-être cette phrase de l’écrivain Henry Jeanson “La démocratie, c'est quand on sonne chez vous à six heures du matin... et que c'est le laitier !”  

Je suis à la fin de ma vie et je me demande quel avenir attend mes enfants. Moi qui suis né en Algérie, de parents Espagnols et Italiens et qui ai fondé ici une famille de quatre enfants avec une épouse d’origine Kabyle, je ne comprends plus rien. Cette époque où les passions se déchaînent devient de plus en plus violente avec un rejet presque systématique de la différence de l’autre pour ne laisser place qu’à une pensée unique, principe que mon regretté père avait refusé quand il a déchiré sa carte du parti communiste en 1936 à Alger. Même si l’on s’interroge sur l’aberration de certains slogans extrémistes, il faut prendre garde à ne pas trop minimiser leur pouvoir nocif. Ainsi, mes parents n’ont pas manqué de me raconter les réactions des gens, dans les années qui ont précédé l’arrivée du 3ème Reich ; la diffusion des discours d’Hitler aux actualités cinématographiques faisaient souvent rire car on disait qu’il ressemblait à un pantin ! Hélas, un jour on a cessé de rire car « les loups sont entrés dans Paris ».

J’écris tout ceci, non pas pour faire du sensationnel mais parce que j’ai vécu des évènements traumatisants dans un pays où la démocratie n’existait pas et j’ai très peur qu’on nous enlève un jour notre liberté comme celle que nous avons ici de pouvoir nous exprimer sur ce site. Certains ne mesurent pas la chance qu’ils ont de vivre en France.

Pour la petite histoire, je vais raconter ici ce qui m’est arrivé lors d’un séjour dans l’ex-URSS des années 85.

Etant curieux de nature et soucieux de vérité, j’ai pour principe de me méfier de ce qu’on raconte sur tel ou tel pays et préfère constater les choses moi-même avant de me faire une opinion. C’est donc avec mon appareil photo en bandoulière que j’ai parcouru Moscou et des villes comme Tachkent, Samarkand, Boukhara et Ourguentch en Asie centrale, parlant avec les habitants au grand dam des apparatchiks du pouvoir toujours à l’aguet qui n’appréciaient pas ma curiosité mais qui demandaient tout de même que je règle mes achats en dollars et non en roubles ! Ainsi, malgré les commentaires propagandistes sirupeux faits aux visiteurs, j’ai pu constater que les musulmans de ces républiques ne pouvaient pas pratiquer librement leur foi et qu’il n’y avait pas d’appel à la prière par le muezzin (inexistant). Mieux que cela, les écoles coraniques (Médersas) ne servaient pour la circonstance qu’à recevoir les touristes pour lesquels des spectacles étaient organisés avec des jeunes femmes très légèrement vêtues faisant la danse du ventre sur des musiques orientales pendant que le champagne et les alcools coulaient à flot ! Je ne manquais pas bien-sûr de prendre des photos et d’interroger le maximum d’habitants qui m’apprirent par exemple que l’entretient et la restauration des Médersas étaient fait gratuitement par des étudiants musulmans.

Ma curiosité m’a coûté cher. Deux individus habillés d’un uniforme foncé (que je n’avais pas vu arriver), m’ont empoigné et emmené loin de là dans un poste de sécurité où se tenaient des policiers portant la casquette à plateau des officiers Russes. L’un d’eux me regarda avec un sourire, mettant un doigt sous son œil en disant « tourist » ? En fait, ils m’avaient pris pour un espion au service d’une puissance étrangère et comme ils ne parlaient ni le Français ni l’Anglais j’ai dû pendant des heures tenter de m’expliquer avec des signes pour prouver que je n’étais simplement qu’un touriste. Bien entendu, la pellicule de mon appareil photo fut détruite. Quand on m’a laissé sortir, je suis retourné à l’hôtel écœuré, décidant d’écourter mon voyage.

Mais je n’étais pas au bout de mes peines car, au moment de l’embarquement à l’aéroport Tcheremkhovo, le contrôleur de service avec sa casquette à plateau sur la tête, l’air soupçonneux, avec des signes me montrait le bouton que j’avais sur le visage et qui n’apparaissait pas sur la photo de mon passeport. Effectivement, j’avais eu une gastro-entérite pendant le séjour (tourista oblige !), avec réaction allergique à la nourriture ! C’est l’intervention de l’attachée d’ambassade qui me permit de monter enfin dans l’avion. Quand nous avons survolé la campagne Française avant d’atterrir, je regardais par le hublot les champs cultivés avec de jolies maisons et j’avais le cœur serré.

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